Une récente décision du tribunal administratif de Limoges confirme qu’une communauté de communes peut vendre un bien de son domaine privé à un prix inférieur à celui du marché, à condition que cette vente soit motivée par des raisons d’intérêt général – ici un intérêt écologique – et qu’elle comporte des contreparties suffisantes.
Le tribunal administratif de Limoges a récemment statué sur la vente d’un bien immobilier appartenant à une communauté de communes. Cette vente, réalisée à un prix inférieur à celui du marché, a été jugée conforme aux principes prévalant en matière de vente de biens publics en raison des motifs d’intérêt général et des contreparties suffisantes qu’elle comportait.
En application de la jurisprudence du Conseil d’État, et plus spécifiquement de l’arrêt Commune de Fougerolles du 3 novembre 1997 maintes fois réaffirmé, il est établi qu’une collectivité publique peut céder un bien à un prix inférieur à sa valeur marchande si cette cession est justifiée par des motifs d’intérêt général et comporte des contreparties suffisantes. Le juge doit alors identifier les avantages procurés par la cession et vérifier leur effectivité, en tenant compte de la nature des contreparties et des obligations mises à la charge des cessionnaires. Enfin, il doit apprécier si ces contreparties sont suffisantes pour justifier la différence entre le prix de vente et la valeur du bien cédé (CE, 14 octobre 2015, Commune de Châtillon-sur-Seine, n° 375577).
Dans le cas présent, la communauté de communes, propriétaire d’un ensemble immobilier comprenant un moulin et un étang, avait décidé de le vendre. La valeur de ce bien avait été estimée à 25 000 euros par les services du Domaine. Le tribunal a jugé que la vente à une association environnementale pour 30 000 euros, avec la prise en charge par la communauté de communes de travaux d’effacement de l’étang à hauteur de 55 824 euros, était justifiée.
Le tribunal a relevé que cet ensemble immobilier présentait des enjeux écologiques importants, étant situé en zone Natura 2000 et en zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF), et abritant des espèces protégées. Le projet de l’association, en partenariat avec la fédération des parcs naturels régionaux et la communauté de communes, visait à effacer l’étang, reconstituer des mares, entretenir les nouvelles zones humides par pâturage, organiser des animations et des actions de sensibilisation, et restaurer le moulin pour des activités scientifiques et d’animation.
Le tribunal a conclu que la cession comportait des contreparties suffisantes pour la communauté de communes, notamment en termes de transfert des coûts d’entretien, et qu’elle n’avait donc pas vendu son bien à un prix inférieur à sa valeur, malgré une offre concurrente de 25 000 euros d’une entreprise privée à des fins commerciales.
Ce jugement est également intéressant en ce qu’il rappelle le principe selon lequel une personne publique est tenue de respecter le principe d’égalité de traitement entre les candidats à l’achat d’un bien, lorsqu’elle a fait le choix, sans y être contrainte, de céder ce bien de son domaine privé par la voie d’un appel à projets comportant une mise en concurrence.
La décision commentée offre une bonne illustration de l’étendue du contrôle opéré par le juge administratif en pareil cas.